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Témoignages, épisode 3 : Stéphane, "pas assez handicapé pour être opéré"

Comment se déclenchent les symptômes du syndrome de déhiscence du canal semi-circulaire supérieur ? Quel parcours pour poser un diagnostic complet ? Que fait-on de ce verdict "pas assez handicapé pour être opéré" ? Stéphane partage avec nous son témoignage.


Le déclenchement des symptômes

Lors d'un voyage en TGV, on parlait boulot avec les collègues. Le TGV passe dans un long tunnel et comme d'habitude je sens une petite pression dans les oreilles. Comme d'habitude, je serre un peu les dents pour que ça passe. Mais cette fois-ci, c'était plus fort et j'ai entendu un petit craquement dans mon oreille droite. Ça n'a pas été douloureux mais, surpris, j'ai dit aux collègues "Costaud la pression là !!", pensant qu'ils l'avaient ressentie comme moi. Dans les heures qui suivirent, rien de spécial, mais le soir, au restaurant, il fallait parler un peu fort pour se faire entendre. Et j'avais une gêne, comme une goutte d'eau dans l'oreille droite, que j'essayais d'enlever plus ou moins discrètement en faisant ventouse avec mon petit doigt. Dès que ma voix vibrait, toute mon oreille interne vibrait à l'unisson. Une sensation très désagréable. Une sensation qui ne m'a jamais plus quittée.


Consultations de médecine généraliste

2 jours plus tard je voyais un médecin généraliste qui a misé sur un bouchon d'oreille à enlever avec un produit. Une semaine plus tard, un second médecin généraliste me prescrit un nouveau produit plus efficace pour enlever un résidu qu'il ne voit pourtant pas. Je me revois encore avec mon produit dans l'oreille, tête penchée 2 ou 3 fois par jour. Je laissais agir plus longtemps que ce qu'indiquait la notice puis je rinçais pendant de longues minutes avec une poire à lavement pour injecter de l'eau tiède.


Errance diagnostique et nouveaux symptômes

Je commençais à m'énerver, je commençais à m'inquiéter. Pas le moindre mieux malgré toute ma patience et mes efforts.

Je prends alors rendez-vous chez un chirurgien ORL dans la clinique près de chez moi. Il ne voit pas ce que cela peut être... Il m'envoie passer une IRM en me disant : "Bon courage pour le délai". Entre-temps, nous partons en vacances à la mer avec ma femme et mes enfants. J'entends toujours mon cœur battre dans mon oreille, j'ai toujours cette goutte d'eau dans l'oreille. Je ne joue plus de guitare, je ne chante plus, je parle quasiment plus que doucement.

De nouvelles sensations apparaissent : certains sons me dérangent. On dirait qu'ils rebondissent dans mon crâne. Je m'aperçois que j'entends mes pas et puis que je ne marche plus droit si je ne regarde pas droit devant moi… Puis un jour, avant d'aller se baigner, je voulais gonfler les bouées des enfants, mais je n'ai pas pu. Quand je soufflais, cela provoquait des vertiges. Ma femme m'a vite emmené chez un généraliste sur notre lieu de vacances. Encore un pauvre médecin qui n'a pas su me dire ce qui se passait... Je suis parvenu, après les vacances, à trouver rapidement un RDV dans un centre IRM, mais l'examen ne donne rien d'anormal. "Tout va bien". Mais non tout ne va pas bien !!! Cela fait maintenant plus de 3 mois qu'il y a un problème !!! Que se passe-t-il ?? Au retour de vacances et à la suite de cette IRM, le chirurgien ne voit vraiment pas ce que je peux avoir. Il m'accompagne vers la sortie, me fait une tape dans le dos en me disant "Allez, bon courage, 80 € s'il vous plaît" sans aucune autre indication que l'ordre pour le chèque. Au travail, une collègue prend plus soin de s'adapter à tout ça... Les autres s'en foutent plus ou moins royalement. À la maison, j'ai beau demander de faire attention, les assiettes s'entrechoquent autant dans le vaisselier que dans mon crâne, les enfants crient toujours autant. La maladie est invisible, je ne leur en veux pas. Le monde a bien le droit de continuer de tourner ! Elle me pousse à chercher du calme, à éviter les repas ou les situations où les discussions se croisent, à fermer les yeux quelques secondes pour gagner un peu de repos. Les concerts, le cinéma, les fêtes... tout ça je laisse tomber.


Consultation d’un second ORL, le diagnostic

Je décide de consulter un médecin ORL plutôt réputé ici. Celui-ci prend plus de temps, il ne voit pas non plus, mais il cherche, suspecte une éventuelle fistule. Sans certitude, il m'envoie faire un scanner des rochers. Et c'est ici pour la première fois que l'on voit apparaître le mot "déhiscence". Lors de mon rendez-vous pour interpréter le scanner, il m'explique qu'il suspecte ce que l'on appelle un Syndrome de Minor. Qu'il s'agit d'une maladie rare et que lui ne pourra rien faire pour moi. Il m'explique cependant en quoi consiste le traitement chirurgical ("on ouvre le crâne ici, on pousse un peu le cerveau et on bouche la déhiscence") et me dit qu’il va m'envoyer vers un confrère chirurgien en oto-neurologie à l'hôpital Lyon Sud. À son écoute, j'ai les larmes aux yeux, car ce qu'il m'explique, notamment en quoi consiste l'opération, commence déjà à me faire peur. Je retourne dans la voiture où m'attend ma femme, frappe le volant de colère et de désarroi. Les larmes toujours au bord des yeux... À quoi va dorénavant ressembler ma vie ?


Les examens complémentaires, rebondissements et verdict

Je suis néanmoins le chemin qui m'est proposé et prends rendez-vous avec ce professeur chirurgien à l'hôpital Lyon Sud. Celui-ci me fera passer des tests auditifs de base. Il ne constate pas de perte d'audition sur l'oreille souffrante, la droite. Mais une surdité naissante à gauche. Décidément, je vais de bonnes nouvelles en bonnes nouvelles... Il m'explique que cette déhiscence est là depuis très longtemps et qu'elle n'est pas la cause de mes symptômes. Selon lui, je n'ai pas le syndrome de Minor car celui-ci serait forcément associé à une perte auditive. Il reste encore des examens avec un kinésithérapeute à passer et notamment l'examen PEO. Mais pour lui, le diagnostic est posé. Mes symptômes sont dus au stress généré par mon travail.

Les tests se font en présence de 3 étudiants étrangers. Ils boivent les paroles du chef kiné. Du jargon médical incompréhensible. Je me dis qu'il se la pète ce type. D'un autre côté, je suis assez admiratif… Mais impossible de savoir s'il constate des choses normales ou anormales… À la fin, un étudiant s'approche et me demande "vous entendez vos pas ?". Je ne sais pas pourquoi, mais je suis presque content de lui dire "oui". Comme s'il connaissait bien la maladie et qu'il allait me dire "Ne vous inquiétez pas, ça va passer".

À la suite des résultats de cette séance, le chirurgien me reçoit une dernière fois pour me dire que finalement j'ai bien un syndrome de Minor. M'explique à nouveau en quoi consiste la chirurgie et quels sont les risques associés. Notamment un fort risque de surdité totale sur l'oreille opérée. Ce qui serait mauvais étant donné qu'à gauche, l'audition n'est pas top... de plus, celui-ci m'annonce que l'opération a peu de chance de guérir les symptômes que je supportais jusqu'ici, particulièrement l'autophonie et l'hyperacousie. Il me conseille alors, et ce sont ces dernières paroles, de revenir le voir quand je serai plus handicapé.


C'était il y a 3 ans. Et depuis j'attends patiemment que les symptômes vestibulaires apparaissent... 3 ans que j'attends d'être handicapé pour pouvoir subir une opération qui risque de ne pas me guérir ! Heureusement, depuis très récemment, le groupe Facebook et l'association syndrome de Minor luttent pour que de nouvelles perspectives de prise en charge de cette maladie apparaissent en France.


 

Quand les symptômes se déclenchent, le premier réflexe est d’aller voir son ou sa médecin généraliste. On parle de 7000 maladies rares, qui touchent 3 millions de personnes en France. Si c’est bel et bien un enjeu majeur de santé publique, les médecins généralistes ne peuvent évidemment pas les connaître toutes et s'ensuit alors une errance diagnostique pour le moins pénible.

Ce dont on prend aussi conscience en lisant ces témoignages, c’est que selon les médecins ORL sur qui l’on tombe, le parcours, les conseils vont varier. Probablement en raison du peu de recul, de la rareté présumée de la maladie, du manque d’études. En bref, il y a encore tellement à faire pour avancer sur la prise en charge de cette maladie !




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