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Migraine vestibulaire : qu'est-ce que c'est ? par le Dr Hervé Bozec

  • Asso
  • 12 nov.
  • 5 min de lecture

Qu'est-ce qu'une migraine vestibulaire ? Quels sont les facteurs déclenchants ? Comment poser un diagnostic ? Comment la traiter ? Le Dr Hervé Bozec, ORL à la clinique de l'oreille répond à toutes vos questions.


Dr Hervé Bozec, ORL à la clinique de l'oreille. Article sur les migraines vestibulaires.
Dr Hervé Bozec

La migraine peut donner des vertiges !

Cela peut surprendre car, dans le langage courant, la migraine est déjà un symptôme et ne pourrait être confondue avec un autre symptôme comme le vertige.





Qu'est-ce qu'une migraine vestibulaire ? Deux définitions :


Il existe, malheureusement, deux définitions du mot migraine. Malheureusement car c’est la source de confusions pour les patients (et parfois pour les soignants).


  1. La définition la plus connue car la plus commune et inscrite dans le dictionnaire de langue française est une forte douleur du crâne. Dans le jargon médical, la douleur du crâne est appelée céphalée.


  2. La seconde définition est médicale : il s’agit d’une maladie neurologique, au même titre que d’autres maladies neurologiques comme la maladie de Parkinson ou la sclérose en plaque, par exemple. Pour limiter les confusions, on devrait d’ailleurs l’appeler maladie migraineuse.


La "maladie migraineuse" est une maladie très fréquente. On estime qu’environ 20 % des femmes (sans doute un peu plus) et 10 % des hommes (sans doute un peu moins) sont atteints.


On connaît, en 2025, environ 180 gènes prédisposants à cette maladie, il s’agit donc d’une maladie que l’on a en soi, dans nos gènes. Ces gênes aboutissent, pour faire simple, à la production de protéines transmembranaires (les membranes des cellules) rendant les cellules nerveuses (les neurones) trop excitables.

Cette hyperexcitabilité neuronale empêche le cerveau d’intégrer correctement les messages sensoriels, en provenance de la rétine, de l’oreille interne, de la sensibilité superficielle (cutanée) et profonde du crâne et du cou et de la muqueuse olfactive (plafond des fosses nasales).


Bien qu’elle soit génétiquement inscrite, elle n’est pas tout le temps symptomatique, c’est-à dire qu’elle ne provoque pas à longueur de temps des symptômes. L’apparition de symptômes est, le plus souvent, consécutive, à un facteur dit déclenchant.

On pourrait faire l’analogie avec un foyer. Pour qu’il s’enflamme et brûle, il faut une allumette. Pour la migraine, l’allumette, c’est le facteur déclenchant.


Quels sont les facteurs déclenchants d'une migraine vestibulaire ?


Les facteurs déclenchants les symptômes migraineux sont connus et nombreux. Les plus fréquents sont les suivants :

- Les variations de production d’hormones sexuelles, notamment les estrogènes. Ce qui explique la fréquence des céphalées d’origine migraineuse survenant 24 à 48 h avant les règles, mais aussi après un accouchement. Ce qui explique également qu’au moment de la ménopause (les estrogènes ne sont définitivement plus produits par les ovaires), nombre de femmes migraineuses ne se plaignent plus ou beaucoup moins de céphalées.

- Le stress au sens large

- La mauvaise gestion d’émotions négatives : sentiment de colère, de déception, de culpabilité

- Certains aliments : alcool, excitants comme le café, certains fromages, certains fruits à coque

- Les troubles du sommeil

- Les changements de rythme (repas, sommeil, activité)

- Une charge mentale élevée (on entend par charge mentale la somme des préoccupations ayant attrait à la vie familiale, professionnelle, conjugale)

- Les troubles de la coordination des mouvements des 2 yeux (au mieux bilantés par un examen orthoptique)

- Les fortes stimulations sensorielles (notamment les mouvements corporels inhabituels et les mouvements complexes ou répétés de la scène visuelle)

- La déshydratation

- L’hypoglycémie (attention aux sauts de repas)

- La fatigue

- Les commotions cérébrales


La migraine vestibulaire, selon les critères diagnostiques actuels, est une forme de migraine

touchant, 20 à 30 % des sujets migraineux.

Sur la population adulte française (environ 57 millions de personnes en 2025), on estime la prévalence (c’est-à-dire le nombre total de sujets atteints rapporté à la population étudiée) à 2,7% soit 1,5 million de personnes atteintes.

Les critères nécessaires pour diagnostiquer une migraine ont été publiés conjointement par la Société Internationale d’otoneurologie, de médecine vestibulaire et de recherche vestibulaire (Bárány Society) et la Société Internationale de l’étude des céphalées (International Headache Society) en 2012 et ont légèrement été modifiés en 2022 :


personne avec des maux de tête, migraine

Comment diagnostiquer une migraine vestibulaire ? Quels critères ?


Ainsi, la migraine vestibulaire peut être diagnostiquée chez un ou une patiente migraineuse

qui a présenté au moins 5 épisodes de vertiges de durée « conséquente » (5 minutes à 72h) et dont au moins la moitié des épisodes s’est accompagnée de symptômes migraineux validés.


Parmi eux, les céphalées bien évidemment qui, pour qu’elles puissent être considérées comme d’origine migraineuse, doivent respecter des critères :

  • unilatérales (la fameuse hémicrânie, issue du grec hemicrania, donnant le mot migraine...),

  • intenses (obligeant à modifier voire à arrêter ses activités),

  • volontiers pulsatiles (on sent battre son cœur dans la tête et, à chaque battement, la douleur s’intensifie)

  • et majorées par les activités physiques de routine.

  • Les autres symptômes sont la photo- et la phonophobie, c’est-à-dire une intolérance à la lumière et aux sons

  • et l’aura visuelle, apparaissant sous forme soit d’une lumière scintillante, soit sous

forme d’un zigzag lumineux encadrant une zone du champ visuel où la vue n’est plus possible (scotome visuel).


Précisons enfin que la migraine peut donner d’autres douleurs que les céphalées telles que les douleurs faciales (comme celles provoquées par une sinusite ou un problème dentaire), les douleurs du cou (trop souvent attribuées à l’arthrose cervicale) et, plus rarement, des douleurs d’oreille (comme celles d’une otite).


Les sensations vertigineuses qu’un migraineux peut ressentir, du fait de sa maladie, sont très variées. Il faut rappeler que le vertige correspond à une sensation erronée de déplacement, d’une illusion de mouvement.


Selon les critères de la Bárány Society, il peut s’agir de vertiges internes (sensations de déplacement de son propre corps), de vertiges externes (sensations de déplacement de l’environnement), de vertiges positionnels (liés à une position particulière de la tête ou à un changement de sa position), de vertiges déclenchés par un déplacement de son propre corps, de vertiges déclenchés par la vision d’un ou plusieurs objets en mouvements ou d’étourdissements.


L’expérience clinique oblige à préciser que beaucoup de patients rapportent des sensations

différentes comme celles de se sentir ivre, d’être instable lors de la marche, d’être désorienté, d’avoir l’impression de tête vide, mais aussi des sensations plus inattendues comme une impression de bascule de la scène visuelle, d’être dans un monde irréel, de ne pas se sentir complètement dans son corps (sensation de désincarnation) ...


Parmi les autres symptômes les plus fréquemment rapportés, il faut souligner la prévalence

des nausées (envie de vomir, sensation d’être barbouillée), des symptômes auditifs (volontiers bilatéraux ou à bascule), comme des acouphènes ou des sensations d’assourdissement, des sensations de pression ou de lourdeur (crâne et œil) et des symptômes cognitifs tels que des difficultés de concentration, de fluidité de la pensée (la fameux brouillard mental) et de la parole (manque du mot, inversions de mot).


Le diagnostic de migraine vestibulaire s’établit en se fondant sur l’interrogatoire du (de la)

patient(e). Il s’agit de dresser une liste d’éléments dans la symptomatologie et de son évolution afin d’obtenir un faisceau d’arguments évocateurs de l’origine migraineuse des vertiges ou des troubles de l’équilibre présentés.


Il n’existe, actuellement, aucune preuve de l’existence d’une migraine chez un individu, tant dans l’examen physique du patient qu’au sein d’examens complémentaires (prises de sang, examens fonctionnels et imageries cérébrales, notamment).

Ces examens, pourtant nécessaires, viseront à éliminer d’autres pathologies qui pourraient

donner un tableau clinique similaire. Le diagnostic de migraine vestibulaire est donc présomptif.


C’est l’évolution des symptômes, notamment sous traitement, qui pourra permettre un

diagnostic de certitude.


Comment traiter une migraine vestibulaire ?


Le traitement comporte 2 volets :

  1. Le traitement des symptômes : vertiges/déséquilibres, nausées, maux de tête etc. Il repose sur des médicaments plus ou moins efficaces.

  2. Le traitement de la maladie migraineuse lorsque les symptômes sont trop fréquents

ou trop invalidants : il repose sur un diptyque associant un traitement médicamenteux à visée le plus souvent neurologique et des conseils d’hygiène de vie visant à diminuer les facteurs déclenchants


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Un grand et chaleureux merci au Dr Hervé Bozec pour avoir pris le temps d'écrire cet article pour notre association !


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©Association "Syndrome de Minor ou Syndrome de déhiscence du canal semi-circulaire supérieur".

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